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Portrait de Michel Hisard par Iser Kouperman
Le résultat du championnat du monde 1952 gagné par le Néerlandais Piet Roozenburg devant le Canadien Dagenais pouvait laisser croire que le départ de Maurice Raichenbach et de Pierre Ghestem de l'arène des combats damiques avait affaibli pour longtemps la France. Peu croyaient à l'avènement d'une nouvelle étoile au championnat du monde 1956. Il est vrai que des 5 participants français, trois : Verse, King et Dionis étaient déjà connus et malgré les succès obtenus dans l'hexagone ces dernières années, aucun d'eux n'avait occupé une place de choix dans les tournois internationaux. Iser Kouperman multiple champion du monde Deux derniers Gournier et Hisard participaient pour la première fois à un tournoi de cette envergure. La lecture de tableau des résultats a confirmé le pronostic disant que le rapport des forces sur la scène mondiale n'évoluait pas : encore un Canadien en tête (ce n'était plus Dagenais mais Deslauriers et pas à la deuxième mais à la première place) puis les Néerlandais Keller, Bom et les autres et c'est seulement à partir de la 7ème place qu'apparaissaient les noms français de Gournier et de Verse. Mais si on devait regarder la créativité, les choses ne se présentaient pas de la même manière et nous voulions parler pour cette raison non pas de ces deux damistes mais d'un joueur partageant la modeste 10/11ème place de Michel Hisard. Que savions-nous de Michel Hisard avant ce championnat du monde de 56 ? Pas grand chose. Nous n'ignorions pas que ce jeune homme de 20 ans avait pris part dans la deuxième série de Championnat de France 1954 où il se plaçait 2ème et un an plus tard en 55, déjà en série Nationale, avait partagé 3/4 place avec l'expérimenté Dionis. De cette période date la partie (voir le diagramme ci-dessous) où le joueur de Blancs ayant le trait fait le coup 1.38-33 au premier abord une gaffe..
Dionis ne tardait pas à répondre 1. 24-29 2.33x24 23-29 3.24x33 14-20 4.25x23 18x47et est passé en dame. Cependant il a rapidement déchanté. Hisard l'a cloué au pilori répondant 5. 48-42 s'appuyant sur la règle majoritaire et sur le coup turc. C'est un exemple montrant un joueur talentueux et qui calcule plus loin. Bien sûr des joueurs comme cela ne manquent pas. Pour devenir un fort joueur à part des capacités combinatoires il convient d'acquérir une maîtrise positionnelle de qualité et cela nécessite des longues années au contact de maîtres expérimentés.
Le succès éclatant au Championnat de France 1956 où Michel Hisard se plaçait 1er et s'adjugeait le titre de Champion de France n'avait pas convaincu tout le monde. Le résultat ne pourrait-il pas être un fruit de hasard ? Les deux positions parues dans la presse à l'époque montraient en effet un joueur tourné vers la tactique. Jouant avec les noirs contre le Lyonnais Béchaz en 56 il confirmait sa supériorité de façon combinatoire (voir le premier diagramme ci-dessous). Dans la seconde partie le maître bien connu Abel Verse a lui aussi failli tomber dans les filets tactiques de jeune prétendant.
C'est avec ces bien pauvres témoignages que nous nous nous sommes mis à analyser ses parties du Championnat du monde 1956. Nous avons été fortement surpris pour ne pas dire éblouis par la découverte. Le vrai visage créatif de Michel Hisard apparaissait d'une partie à l'autre de façon de plus en plus net, celui d'une maîtrise positionnelle robuste avec un don combinatoire étonnant. Dans les débuts des parties Hisard avait démontré une excellente préparation théorique alliée à la compréhension profonde des positions très complexes. Au milieu des parties déjouant avec assurance les rochers dangereux et les rifs sous marins, il dirigeait de main de fer son bateau sur un chemin juste et là où l'adversaire pensait que la tension baissait et le jeu s'approchait de la fin égale et tranquille, grâce à la volonté d'Hisard tout d'un coup l'ouragan de menaces combinatoires et de gambits réapparaissait avec le seul but détruire la position adverse. Naturellement le manque d'expérience n'a pas permis au jeune Hisard de récolter les fruits de son jeu tout en finesse en début et au milieu de la partie. Souvent en fin de partie le gain ou la remise pourtant à portée de main lui échappaient et cela explique son résultat moyen à ce premier championnat du monde. Mais Hisard a bien montré dans ses parties que sa maîtrise positionnelle et tactique allaient harmonieusement de pair, les combinaisons n'étant pas les simples "pièges" mais le fruit d'une construction positionnelle. Tout cela permet de croire en Hisard. Deux exemples pour illustrer le propos. En partie contre le champion Belge Hugo Verpoest, Michel Hisard dès le début de partie avait dominé le jeu.
Verpoest avait compris que pour s'en sortir il fallait simplifier et veut d'échanger le pion taquin par 1.37-32. De façon tout à fait inattendue Hisard exécute alors une série de sacrifices s'appuyant sur l'idée de Weiss 1. 18-23 2.32x21 12-17 3.21x17 22-27 4.31x22 23-28 5.22x33 13-18 6.12x23 19x48 et les Noirs passent en dame. Dans ce même tournoi en partie contre son compatriote Gournier, Michel Hisard a obtenu un jeu plus souple avec les Noirs.
Les Blancs ont des difficultés pour développer leur jeu sur l'aile droite à cause de la position de pion 29. Afin de s'en défaire ils ont joué 1.29-24 mais Hisard a préparé une réponse tout en finesse. 1. 25-30 2.24-20 15x24 3.40-34 22-27! (une manoeuvre inattendue visant à découvrir la cas 38) 4.34x25 26-31 5.37x26 27-32 6.38x27 14-20 7.25x14 13-19 8.14x23 18x47 et les Noirs ont gagné la partie.
La profondeur de jeu de Hisard prouve que le jeune champion Français n'est pas arrivé sur l'arène mondiale par hasard et grâce aux efforts créatives de vrais succès l'attendent dans des compétitions internationales. Il est facile de comprendre l'intérêt avec lequel nous avons suivi la suite de ses performances. Un tournoi international aux Pays-Bas avec la participation des joueurs de qualité se disputait 6 mois après le championnat du monde. Hisard l'a remporté brillamment. Un nouveau succès l'attendait au championnat de France qui suivait. Michel Hisard n'a pas encore atteint l'apogée dans sa créativité, c'est naturel étant donné son âge mais nous voyons d'ores et déjà le potentiel un grand maître, un espoir pour la France damiste.
L'article intitulé "La créativité de Michel Hisard" par I.Kouperman et D.Bass tiré du livre - "Русские и стоклеточные шашки" (Le jeu de dames russe et sur 100 cases), Moscou 1959, pp 214-218 / traduction du russe par le webmestre /
Michel Hisard opposé à Iser Kouperman lors du challenge mondial - 1958 (voir la page dédiée) |
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La
France a donné au monde damiste toute une pléiade de noms illustres dont
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